Pas de soumission à la contractualisation

macron

Credits photo : Pablo Tupin-Noriega

D’ici au 30 juin, les 322 collectivités locales les plus importantes au regard de leur budget de fonctionnement sont sommées de signer un contrat financier avec l’Etat visant à la baisse de leurs dépenses de fonctionnement. Grossier, inefficace, anti-démocratique, nous, élu·e·s de La France insoumise, refusons ce chantage et porterons au sein des collectivités dans lesquelles nous siégeons l’exigence de ne pas céder.

Se vantant de vouloir établir un « nouveau paradigme » dans ses relations avec les collectivités, le gouvernement a fait adopter dans la loi de finances 2018 le principe de contractualisation : au premier semestre 2018, les collectivités dont les dépenses sont supérieures à 60 millions d’euros de budget principal doivent ainsi passer un contrat d’une durée de trois ans avec l’Etat. Celui-ci repose sur la limitation de l’évolution de leurs dépenses de fonctionnement à 1.2% par an.

Ces 1.2 % ont été décidés sur un coin de table comme la barre fatidique des 3% de déficit au niveau européen dont ils découlent. Ils correspondent à l’objectif de baisse du déficit des collectivités locales de 2.6 milliards(Mds) d’euros par an sur cinq ans pour atteindre les 13 milliards d’économies promis par M. Macron à Bruxelles ! Le même M. Macron ne rappelait-il pas d’ailleurs encore le 10 mai dernier, devant le parterre des maîtres de Bruxelles réunis à Aix-la-Chapelle, que pour lui « la baisse de la dépense publique est la seule condition pour avancer en Europe » ?

Cette nouvelle épée de Damoclès qui pèse sur la tête des collectivités s’inscrit en dehors de toute réalité. Elle ne prend en compte ni l’inflation, ni l’évolution des carrières des agents, ni l’augmentation de la population… Ainsi, l’inflation, estimée à 1.1% en 2018, est envisagée à 1.75% en 2022. Dans le même temps, les carrières des agents vont continuer à progresser et le glissement vieillissement technicité (GVT) va logiquement augmenter. Enfin, l’évolution de la population est estimée, en fourchette basse, à 0.45% de hausse par an. L’un dans l’autre, pour maintenir un niveau de service par habitant·e constant, ce sont au bas mot plus de 3.5 points de baisse de dépenses que les collectivités devraient supporter d’ici à 2022 !

Face à ce coût coup de rabot et alors même que la baisse continue des dotations depuis 2011 a déjà désorganisé le service public local, cette approche purement comptable ne peut que se traduire par l’abandon de services rendus ou par leur privatisation. Alors même que la suppression de 120.000 agents est annoncée pendant le quinquennat, plus grand plan social qu’ait connu le pays depuis la Libération, c’est toujours moins de service public et donc moins de cohésion et de capacité à bien-vivre qui est programmée.

La contractualisation est par ailleurs un marché de dupes : si l’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement n’est pas tenu, la dotation globale de fonctionnement octroyée par l’Etat se verrait amputée de 75% du dépassement (100% pour les communes qui auraient refusé de signer le contrat). A l’inverse, la majoration du taux de subvention des opérations bénéficiant de la Dotation de Soutien à l’Investissement Local reste elle de l’ordre de la « possibilité », le genre de promesse que l’Etat ne nous a que trop habitué à ne pas tenir !

Mais refuser cette contractualisation est aussi une question de principe tant elle met à mal le principe constitutionnel de libre administration des collectivités. L’air de ne pas y toucher, l’Etat continu à reprendre la main, notamment sur les communes : déjà dessaisies de compétences essentielles lors de la loi NOTRe, privées du levier de la fiscalité locale -la suppression de la taxe d’habitation en étant le dernier exemple en date- l’étranglement financier s’inscrit donc désormais dans la Loi et, comble du cynisme, exige le consentement contraint de celles et ceux qui en sont victimes.

Cet autoritarisme va même jusqu’à remettre en cause l’exercice démocratique lui-même et la souveraineté des administrés. La contractualisation exige en effet des élu·e·s locaux·les qu’ils engagent leur évolution budgétaire pendant trois ans, soit au-delà de leur propre mandat. Là où l’élaboration du budget est le poumon de la vie démocratique locale, celui-ci se verrait corseté y compris pour les choix des majorités futures qui seront pourtant décidées en 2020 par les citoyen·ne·s. L’Etat dessaisit les communes de leurs choix pour imposer les siens, effaçant en cela le premier échelon démocratique de notre pays.

C’est pourquoi nous élu·e·s de La France insoumise exprimons clairement notre refus de la contractualisation. Partout où nous siégeons, nous appelons les assemblées locales à ne pas céder au chantage de M. Macron et les invitons à refuser collectivement ce recul démocratique.

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